Premiers pas

La première publication de cet article a eu lieu le 5 août 2011.

En décidant de créer une troupe scoute à Saintes, nous nous étions lancés dans une entreprise difficile, exigeante mais combien passionnante, envoûtante. Nous devions transmettre les techniques de la vie scoute et inculquer l’esprit scout à un vivier de jeunes garçons à l’aube de leur existence. Ils devaient pouvoir réaliser leur premier grand camp un an plus tard, une expérience qui les amènerait à se serrer les coudes dans une vie rude mais fraternelle et sans artifice. Deux activités parmi d’autres ont servi ces objectifs : l’apprentissage du woodcraft et les premières promesses.

Pour éviter que des novices ne se retrouvent à l’orée du bois avec une scie, une boule de corde et la mission de construire une table, nous avions organisé une réunion des CP et seconds ainsi que deux réunions de patrouille afin de leur donner les bases du woodcraft. Tout au long de ces journées de travail du printemps 1972 dans un bosquet derrière la cure, ils avaient appris à choisir les bonnes branches d’arbre, à les scier et à les assembler au moyen de brêlages carrés. Ils n’ont pas vraiment réalisé de construction mais plutôt assimilé les principales techniques du woodcraft.

Nous avions dû obtenir l’accord préalable du curé car plusieurs arbres allaient être amputés. Mais nous recevions toujours son approbation quasi inconditionnelle tant il nous faisait confiance et admirait la fougue qui nous animait. Son attitude était telle que jamais nous n’aurions imaginé trahir sa confiance. L’abbé Delacroix doit sans conteste être compté au nombre des fondateurs de la troupe Sainte-Renelde.

Comment faisions-nous pour enseigner la technique aux scouts ? Nous aurions pu les éblouir avec nos connaissances. C’eût été facile mais ça n’aurait pas suffi. Nous leur avons communiqué notre enthousiasme, nos croyances, notre amour de la vie scoute. Cela leur a permis de surmonter les obstacles et d’entraîner les autres avec eux.

En marge de ces journées, nous avions également organisé les premières promesses. Si les scouts étaient arrivés aux réunions en dilettantes, ils n’auraient rien construit de solide. Nous désirions qu’ils acquièrent le sens des responsabilités. Promettre allait être pour eux une façon un peu solennelle de s’engager, de déclarer : « D’accord, j’accepte les règles du scoutisme. Je m’efforcerai de les suivre le mieux possible. » Nous souhaitions que quelques aînés inaugurent cette tradition avant le grand camp. Demander cela aux CP et seconds nous semblait un bon début. Mais qui étaient ces CP et seconds ?

Dès la réunion d’inauguration, nous avions formé deux patrouilles : les Aigles avec leur nœud d’épaule vert et noir et les Renards avec leur nœud d’épaule jaune et vert. Au commencement, l’histoire des aînés de la troupe a fonctionné par couples. Les premiers CP furent Jean-Pierre et Jean-Marie. Ils avaient déjà l’âge d’être routiers mais pas les connaissances ni l’expérience. Ils devinèrent le fossé qu’ils devaient franchir. Ils n’ont pas mordu. De bonne heure, leurs seconds Élan et Chat prirent la relève. Comment réagissaient ces nouveaux CP de quatorze ans face au scoutisme ? Ils en respiraient l’air pur à pleins poumons, ils en buvaient l’eau de source émerveillés, ils en croquaient les fruits parfumés avec délice. Leur fidélité était entière et leurs noms résonnent encore aujourd’hui. Furet et Poulain devinrent seconds à leur tour. Ils démarrèrent plus modérément, participèrent au premier grand camp mais quittèrent ensuite. Daim et Geai les remplacèrent.

Mais revenons aux tout premiers mois de la troupe. Les scouts et les parents s’étaient réunis dans le jardin de la cure le 23 avril 1972. Élan, Chat, Furet et Poulain allaient faire leur promesse. Ils scellèrent publiquement leur engagement en attendant d’être totémisés au grand camp. « Sur mon honneur et avec la grâce de Dieu, je m’engage à faire de mon mieux pour servir Dieu et l’Église catholique, le Roi et la Belgique, aider mon prochain en toutes circonstances, observer la loi scoute. » Les phrases rituelles un peu désuètes retentissaient pour la première fois à Saintes. Un pacte venait d’être conclu. Nous poursuivions notre route, préparions l’avenir. La troupe marchait insensiblement vers sa destinée.

Fig. 1. Avril 1972. Le jardin de la cure de Saintes. Promesse d’Élan, CP des Aigles. En arrière-plan : Marcassin.

Fig. 1. Avril 1972. Le jardin de la cure de Saintes. Promesse d’Élan, CP des Aigles. En arrière-plan : Marcassin.

Fig. 2. Avril 1972. Le jardin de la cure de Saintes. Promesse de Chat, CP des Renards. En arrière-plan, de gauche à droite : Aiglon, Élan et Marcassin

Fig. 2. Avril 1972. Le jardin de la cure de Saintes. Promesse de Chat, CP des Renards. En arrière-plan, de gauche à droite : Aiglon, Élan et Marcassin

Fig. 3. Avril 1972. Le jardin de la cure de Saintes. Promesse de Furet, second des Aigles.

Fig. 3. Avril 1972. Le jardin de la cure de Saintes. Promesse de Furet, second des Aigles.

Fig. 4. Avril 1972. Le jardin de la cure de Saintes. Promesse de Poulain, second des Renards. En arrière-plan, de gauche à droite : Élan et Marcassin.

Fig. 4. Avril 1972. Le jardin de la cure de Saintes. Promesse de Poulain, second des Renards. En arrière-plan, de gauche à droite : Élan et Marcassin.